Foissy-sur-Vanne

 

Les Hodoart, Seigneurs des Foissy (XVème - XVIème siècles)

La famille Hodoart a bénéficié d'une certaine notoriété en pays sénonais. Son histoire demeure encore assez mal connue, pourtant, elle constitue un témoignage de l'ascension sociale d'un groupe de roturiers vers la noblesse, à une époque qui s'étend du début de la deuxième guerre de Cent Ans (1337) au début du XVIIe siècle.

la ferme de Montaudouart

Les notables sénonais.

La famille Hodoart n'a jamais revendiqué une origine nobiliaire. C'est parmi les cultivateurs et les vignerons de Michery qu'il faut rechercher ses racines. Au début de la deuxième Guerre de Cent Ans, elle s'installe à Sens, se trouvant en sécurité derrière les puissants remparts de la ville. Sans abandonner les biens laissés à Michery.

Sur le plan socioprofessionnel, deux reconversions interviennent successivement.

Les cultivateurs et vignerons se font d'abord négociants en métaux, puis deviennent fournisseurs, en objets de toutes sortes, de la fabrique de la Cathédrale de Sens. Ces métiers leur réussissent : ils s'enrichissent, peuvent acheter des maisons en ville. Au milieu du XVe siècle, ils se sont bien intégrés à la bourgeoisie.

L'historien Gustave Julliot a constaté " que le nom d'Hodoart figure souvent dans les listes de magistrats dont s'honore la Ville de Sens ", tout en regrettant " de ne pouvoir établir (de) filiation ". Plusieurs ecclésiastiques ont également porté ce nom : le plus célèbre d'entre eux est le chanoine Philippe Hodoart (Sens, 1er avril 1457-Sens 20 Juillet 1537) ; fondateur du Collège de Sens. C'est sur lui que l'on a réuni le plus d'informations alors que l'on ignore les lieux et dates de naissance, de mariage et de décès de la plupart des autres membres de la famille. A commencer par Jean Hodoart, père du chanoine, qui est pourtant un personnage essentiel. C'est avec lui que commencent les généalogies officielles des Hodoart : s'étant marié deux fois, il est l'auteur des deux branches. De plus, il oriente ses fils vers la magistrature, qui, dès la fin du XIVe siècle, permet l'accession à la noblesse. A condition d'acquérir des charges au Bailliage de Sens, ou, plus tard, au Présidial. Faute de diplômes juridiques, Jean Hodoart n'a occupé dans la magistrature sénonaise que des emplois subalternes de 1455 à 1480. Il devient maire de Sens de 1480 à 1482.

Il déclenche le lent processus d'anoblissement dont ses héritiers bénéficieront dans deux ou trois générations en en respectant les deux conditions initiales. En premier lieu, vivre " noblement ", autrement dit ne plus exercer d'activités manuelles. Ensuite, posséder une terre noble, en l'occurrence une seigneurie, en totalité ou en partie. Depuis la fin du XIIIe siècle, les roturiers peuvent acheter des biens seigneuriaux, mais précisent diverses ordonnances royales, ils ne deviennent pas nobles pour autant : ils doivent acquitter la redevance du franc-fief, une année de revenu à verser au trésor royal tous les vingt ans, et continuent à payer l'impôt direct, la taille, comme les non-nobles.


Jean Hodoart est vraisemblablement possesseur d'une partie de la seigneurie de Foissy-sur-Vanne avant son premier mariage ; laquelle vient s'ajouter à ses maisons de Sens et de Michery et constitue un ensemble foncier important qui lui permet de demander la main de riches héritières.

Généalogie simplifiée de la famille Hodoart

Jean Hodoart a épousé :

en premières noces, Marie Dostun, fille de Guillaume Dostun, bailli de Sens, qui lui apporte en dot la seigneurie de Lugny (près de Melun, en Seine et Marne) ; de cette première union sont nés
Pierre, avocat et échevin à Sens, licencié en lois, bachelier en décrets, prévôt de Villeneuve le Roi ; mort en 1505, il a épousé Charlotte Gérardin dont il a eu trois enfants;
Catherine épouse de Jean Ravault, procureur du Roi au bailliage de Sens ;
Philippe (1457-1537), le distingué chanoine dont il a déjà été question et qui héritera de la terre de Lugny ;

en secondes noces, Jeanne la Flotte héritière du fief des Pelletiers, à Soucy, qu'elle transmettra à son fils Antoine, l'aîné des deux enfants qu'elle a eu de Jean Hodoart, à qui reviendra la seigneurie de Foissy.

Les descendants de Jean Hodoart et Marie Dostun constituent une première branche dite des " Seigneurs de la Borde Vaujouan ", du nom du fief avec château acquis en 1540 par leur petit -fils Jacques Hodoart, dans la paroisse de Bazoches-sur-Betz (Loiret).

Les descendants de Jean Hodoart et de Jeanne la Flotte appartiennent à la branche dite des " Seigneurs de Foissy, Michery et les Pelletiers ".

Se comportant " noblement " chaque branche a choisi des armoiries différentes. Mais pour les descendants de Jean Hodoart, l'objectif à atteindre reste le même : l'anoblissement par l'acquisition de charges dans la Magistrature. Et le fait est, qu'à de rares exceptions près, les Hodoart seront juristes au bailliage de Sens.

Les enfants et petits-enfants de Jean Hodoart devront entreprendre de longues et onéreuses études à l'Université de Paris, études auxquelles il n'avait pu accéder lui-même. Le financement des études a certainement conditionné les stratégies de transmission des biens à l'intérieur de chacune des branches.

C'est à la branche des seigneurs de Foissy que nous nous intéresserons désormais.

La branche des seigneurs de Foissy.

Cette branche est donc issue du second mariage de Jean Hodoart et de Jeanne la Flotte.

a) Leur fils Antoine continue la lignée en épousant Catherine Picou qui lui donnera quinze enfants : huit garçons et sept filles. Toute la famille a été représentée sur une verrière de la chapelle de Sainte-Colombe du Carrouge. Bienfaiteurs de l'abbaye, Antoine et Catherine ont été inhumés dans le chœur de la chapelle . Catherine est décédée le 10 juin 1533 et Antoine le 15 avril 1534.

Les nombreuses charges de Jean Hodoart le retenaient suffisamment à Sens, où il avait d'ailleurs établi la résidence familiale.

Il semble avoir négligé la gestion du patrimoine extérieur. En fait il se comportait comme les " nouveaux seigneurs ", non issus de la noblesse. Il faut dire qu'après la deuxième guerre de Cent Ans, à l'aube des Temps modernes, l'on ne pouvait plus revenir aux pratiques féodales. Le partage des seigneuries permettait d'assurer une meilleure gestion des terres : le pays tout entier ravagé par la guerre et l'occupation en avait grand besoin. Jean Hodoart n'a certainement fait à Foissy que des séjours épisodiques. Il considérait sa part de la seigneurie comme une propriété foncière dont il percevait les revenus et les redevances seigneuriales encore maintenues ; l'un de ses fermiers pouvait faire office de receveur. Quant aux pouvoirs des anciens seigneurs, certains avaient disparu (droit de battre monnaie, par exemple), d'autres se trouvaient transférés aux communautés d'habitants, souvent issues des fabriques paroissiales (en particulier, l'entretien des chemins). A l'inverse de son père, il semble qu'Antoine Hodoart ait eu le comportement d'un propriétaire terrien. Tout en poursuivant une carrière juridique honorable, malgré des débuts difficiles.

Il succède à son père comme bailli de la cathédrale de Sens mais il n'aborde qu'assez tardivement les études de droit puisqu'il n'obtient sa licence en lois qu'en 1506. Il aurait exercé au bailliage de Sens avocat, soit comme procureur. Il figure également sur la liste des maires de Sens, pour l'année 1514.

Seigneur de Foissy-sur-Vanne, des Pelletiers, de la Perreuse (Saint-Martin-du-Tertre), Antoine Hodoart a repris en main les biens de Michery qui appartiennent au fief de l'abbaye Sainte-Colombe du Carrouge, dont il est, par conséquent, censitaire. Mais, pour l'instant, la période n'est pas propice à l'acquisition d'une partie de la seigneurie de Michery.

A Foissy, au contraire, le calme est revenu dans la paroisse, grâce aux dispositions prises par Etienne Piedefer, écuyer, seigneur haut, justicier, moyen et bas à la fin du XVe siècle. Jusqu'à la Révolution française, il y aura coexistence entre, d'une part, la communauté d'habitants dont le procureur est directement en relation avec l'administration royale, et, d'autre part, les coseigneurs, nobles ou bourgeois, qui ne sont plus responsables que de la gestion de leurs terres.

La " rivière de Vanne " possède un statut particulier : les cisterciens de l'abbaye de Vauluisant considèrent qu'elle leur appartient. Les seigneurs de Molinons ont voulu contester cette prétention : Regnault d'Audoin, écuyer, en 1488, Louis de Launoy, en 1518. Tous deux ont été déboutés de leurs plaintes par le bailliage de Sens qui confirment les droits des religieux sur la rivière. Avec les seigneurs de Foissy, les choses n'ont pas été si loin. En 1481, Adenet de la Ramille, écuyer, obtient des " abbé et religieux de l'abbaye de Vauluisant " l'autorisation de pêcher dans la rivière qui passe devant sa maison: moyennant transaction. En 1528, Antoine Hodoart achète aux cisterciens de Vauluisant le bras de la Vanne situé devant sa maison seigneuriales dans des conditions semblables. D'autres seigneurs reçoivent des rappels à l'ordre pour avoir oublié les droits des religieux sur la rivière de Vanne : Jean de Milly en 1495, Louis Hérault en 1518, Henry de Milly en 1522, par exemple.

Les moines de Vauluisant possédant plusieurs moulins sur la Vanne, ces " droits sur la rivière " leur permettent d'en surveiller le cours. A cause de la conception même de leurs monastères, les cisterciens sont apparus dès le XIIe siècle comme des maîtres de l'hydrodynamique.

Après sa mort, les terres d'Antoine Hodoart sont transmises à quatre de ses enfants, vraisemblablement les aînés :
Savinien reçoit la seigneurie de Foissy et continue la lignée ;

Potentien., à qui reviennent les terres de Michery, devient coseigneur du dit lieu en 1539, après plusieurs procès ; il peut être considéré comme l'auteur de la branche cadette des seigneurs de Michery ; nous reparlerons de lui un peu plus loin.
Paule. hérite du fief de la Ferreuse, qu'elle transmet à ses deux maris successifs.

Louise, hérite du fief des Pelletiers qu'elle transmet à son mari Jean Demas, contrôleur du grenier à sel de Sens ; elle était également dame de la quatrième partie de la seigneurie de Mâlay-le-Roi (actuellement Malay-le-Petit).

b) Savinien Hodoart, seigneur de Foissy en partie, a connu une certaine célébrité en son temps par les charges qu'il a occupées et les responsabilités qui lui ont été confiées. En l'absence d'informations sur son état-civil, il est néanmoins possible de retracer les grandes lignes de sa carrière.

Comme son père, il a étudié le Droit (à Paris) et a obtenu une licence-ès-lois. De 1516 à 1555 il est procureur du Roi au bailliage de Sens. Il devient maire de cette ville en 1525 et 1526. Enfin, en 1534 et 1537, il est bailli de Vauluisant.
En 1545, le Roi François Ier fait convoquer à Sens le ban et l'arrière-ban du bailliage. Malgré la création d'une armée permanente par Charles VII, la royauté continue à faire appel à ses vassaux. L'obligation militaire étant toujours attachée à la possession d'une terre noble, tout détenteur de fiefs et d'arrière-fiefs, qu'il soit noble ou bourgeois s'y trouve soumis. Toutefois, de nombreuses exemptions existent, en particulier pour la magistrature. Donc, pour " Noble homme et sage maistre Savinien Hodoart "; convoqué à la montre du 15 mai 1545 à Sens, pour sa seigneurie de Foissy, il a été " déclaré exempt à cause de son (...) office; " L'expression " Noble homme " ne doit pas faire illusion. Elle ne signifie pas que Savinien Hodoart ait été anobli : elle est utilisée " illégalement " pourrait-on dire, par déférence envers un seigneur non noble, occupant un rang social élevé.

D'autre part les procureurs du Roi jouissaient de privilèges semblables à ceux des militaires en exercice : ils étaient en effet exempts d'impôts (taille) et des droits de franc-fief s'ils possédaient une seigneurie.

La participation de Savinien Hodoart à la rédaction de la Coutume de Sens a largement contribué à sa réputation. Les sentences rendues par les diverses juridictions s'appuient sur le droit romain, le droit canon et sur la Coutume, ensemble de règles de droit établies par l'usage n'allant pas à l'encontre des lois édictées par l'autorité royale. Transmises par tradition orale, les Coutumes avaient un caractère régional et quelquefois même local. Afin d'uniformiser le droit coutumier, l'ordonnance de Montilz-lès-Tours (1454) prescrit dans un premier temps la rédaction des Coutumes de chaque bailliage. A Sens un premier texte a été établi en 1495, mais son application en était difficile. Le roi Henri II demande une " réformation " révision qui entraîne une nouvelle rédaction, sous la direction de Christofle de Thou, Premier Président du Parlement de Paris, Christofle de Harlay et Barthélémy Paye, tous deux conseillers au Parlement de Paris.

Le texte de la Coutume a été établi au cours d'assemblées du bailliage de Sens. Parmi les personnalités présentes, le cardinal de Bourbon, archevêque de Sens; le cardinal Odet de Châtillon, abbé commendataire de Vauluisant et d'autres abbayes, frère de l'amiral de Coligny, Caracciolo, évêque de Troyes, issu d'une noble famille napolitaine. Odet de Châtillon et Caracciolo devaient se convertir au protestantisme. Anne de Pisseleu, l'une des anciennes maîtresses du roi François Ier, a été convoquée en sa qualité de duchesse d'Etampes, fief alors du ressort du bailliage de Sens.

Parmi les seigneurs, quatre appartiennent à la famille Raguier, d'origine allemande, venue en France avec la suite de la reine Isabeau de Bavière : Guillaume Raguier, seigneur de Saligny, aumônier de la Reine; son frère, Louis Raguier, seigneur d'Esternay et autres lieux, gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, représenté par son épouse Charlotte de Dinteville, dame de la Motte-Tilly; François Raguier, seigneur de la Villeneuve-aux-Riches-Hommes; Jean Ragnier, seigneur de Villenard.
Nous citerons encore : Claude de Pontville, écuyer, seigneur de Flacy et de Rigny-le-Ferron (en partie) et son frère, Gratien de Pontville, écuyer, seigneur de Vulaines, Galéas de Bérulle, écuyer, seigneur de Vieil-Verger, personnages mentionnés par la suite.

Savinien Hodoart a épousé Marguerite Guillard de l'Isle, originaire de Montereau. Dans son testament, en date du 11 mars 1550, elle fonde une bourse destinée à entretenir un élève du Collège de Sens.

De leur union, quatre enfants sont nés: les biens de Foissy reviennent aux trois fils :

Jean, homme d'église, prieur de Saint-Nicolas, seigneur (en partie) de Foissy ;
Claude, également seigneur de Foissy (autre partie) a d'abord été conseiller, puis procureur du Roi au bailliage de Sens avant de choisir la carrière militaire.
Savinien demeure pour l'instant plutôt méconnu ; lui aussi s'est orienté vers le métier des armes. Il semble que l'on ait découpé dans les terres seigneuriales, et à son intention, le fief de Mont-Hodoart, avec manoir, qui deviendra au XVIIe siècle siège d'une seigneurie et d'une prévôté: actuellement, seul ne subsiste que le nom d'un lieu-dit.

Catherine a été mariée deux fois :

en premières noces, elle a épousé Gratien de Pontville (II), écuyer, seigneur de Vulaines, lieutenant au régiment de Barbezieux ;

en secondes noces, elle s'unit en 1586 à Jules (ou Julien d'Abondé), écuyer du Comte de Soissons et issu d'une riche famille italienne, originaire de Mantoue, seigneur d'Aillefol, il devient seigneur de Vulaines après son remariage avec Françoise Piedefer en 1596.

Charlotte Hodoart, cousine éloignée de Catherine, appartenant à la branche de la Borde Vaujouan, épouse en avril 1591 Claude de Pontville, seigneur de Flacy et des Châtelliers, frère de Gratien : elle devient veuve quelques mois après.

Un seul des trois fils du procureur du Roi, Savinien Hodoart s'est marié. Claude a épousé Jeanne de Bérulle, fille de Jacques de Bérulle, écuyer, seigneur de Bailly (Aube), Fourny et Vieilverger (près Fournaudin) et d'Anne de Pommard, du Sauvage mais de leur union est née une fille unique, Claude. Ainsi la branche des seigneurs de Foissy de la famille Hodoart se trouve éteinte avant la fin du XVIe siècle.

c) Derniers Hodoart seigneurs de Foissy, Jean et son frère Claude assurent la gestion des terres. A partir de 1560, Claude Hodoart qui a définitivement opté pour l'état militaire a manifestement d'autres centres d'intérêts que Foissy. Jean Hodoart obtient, dans les années 1563 et 1564 que les religieux de Vauluisant lui abandonnent certains de leurs droits sur la Vanne.

L'on peut se demander pour quelles raisons Claude Hodoart a quitté la Magistrature. Au bailliage de Sens, tout avait pourtant bien commencé : une charge de Conseiller du Roi, à laquelle vient s'ajouter celle du Procureur du Roi (15 mai 1554), vraisemblablement en survivance de son père. Mais, par son mariage, il est devenu le beau-frère de Galéas de Bérulle. Or, celui-ci est persuadé que la vraie noblesse ne s'acquiert que par les faits d'armes. Lui-même, ancien gentilhomme-verrier, a donné l'exemple en embrassant la carrière militaire, où il a payé de sa personne, ses brillants états de services en font foi. De plus, le soldat se double d'un homme d'affaires, brillant négociateur, qui fait ses preuves lors de l'achat de la Seigneurie de Séant-en-Othe, le 24 mars 1567, localité dont le nom deviendra Bérulle. Galéas de Bérulle a vraisemblablement su trouver les mots pour convaincre Claude Hodoart de s'engager dans l'armée royale.

D'autres événements ont pu contribuer à influencer Claude Hodoart. En 1559, les paroissiens de Saint-Hilaire de Sens demandent que soient recherchées les origines nobiliaires des Hodoart, quelle que soit leur branche. La cause de cette interpellation : un problème de fiscalité, sans doute. Les avantages accordés aux magistrats ne sont pas tacitement reconductibles à la génération suivante, il existe des règles précises selon les juridictions. Mais cela n'a pas de commune mesure avec la non imposition héréditaire de la noblesse de souche. L'état militaire reste le plus sûr moyen d'être anobli et exempté d'impôt.

C'est également ce que pense Antoine Hodoart, cousin germain de Claude et fils de Pontentien, seigneur de Michery, puisqu'il s'engage dans le régiment de Bussy d'Amboise. Par contre, dans la branche de la Borde Vaujouan, les professions juridiques n'ont pas été abandonnées.

Le " Capitaine Foissy " et le " Capitaine Michery ".

1562 marque le début des guerres de religion qui ont été particulièrement violentes en Sénonais, Champagne méridionale et jusqu'au Morvan. Une étude d'ensemble, même brève, sort du cadre de cet article, bien que la famille Hodoart soit sortie meurtrie de cette série de conflits.

Toutefois, nous ne pouvons passer sous silence les tristes exploits des deux cousins, Claude et Antoine Hodoart. Leurs convictions religieuses les ont opposés dans le déroulement de leurs carrières militaires respectives, puisque Claude a servi dans les armées catholiques, principalement celles du maréchal Gaspard de Saulx, comte de Tavannes, et Antoine dans une des armées protestantes en formation, vraisemblablement celle du prince de Condé.

C'est probablement Claude, seigneur de Foissy, qui a été nommé le Capitaine Foissy, mais un doute subsiste à ce sujet. Par contre, aucune ambigüité en ce qui concerne Antoine, c'est bien lui le Capitaine Michery, que l'on a voulu présenter comme une victime de la fatalité. Déserteur des cohortes protestantes, il s'acoquine avec des pillards capables des plus violents excès.

Arrêté, condamné à mort, Antoine Hodoart est exécuté à Paris le 24 septembre 1584, après confiscation de ses biens. Pour ses deux fils, il ne sera plus question d'anoblissement.

En 1567, Claude Hodoart et sa famille résident à Nogent-sur-Seine, ils logent dans la propriété des Bernières appartenant aux religieux de Vauluisant. Anne et Jacques de Bérulle, les parents de Jeanne et Galéas, sont inhumés dans la chapelle qu'ils ont fondée en l'église Saint-Laurent de Nogent-sur-Seine. Claude Hodoart, écuyer, seigneur de Foissy, est capitaine des châteaux, parcs et garennes de Nogent et Pont-sur-Seine, et Maître d'Hôtel du duc de Nemours, seigneur du lieu. Le capitaine Hodoart entre en lutte contre les protestants et ceux qui les protègent ; il s'en prend en particulier aux Raguier, récemment convertis à la religion réformée. Il brûle leurs châteaux, dont celui de la Motte-Tilly, après les avoir pillés. Par représailles, les protestants incendient la propriété des Bernières.

Sur ordre du duc d'Anjou, le futur Henri III, le maréchal de Saulx, comte de Tavannes, envoie le capitaine Claude Hodoart rejoindre le corps d'armée qui se forme en Champagne sous le commandement de Louis Prévost de Sansac, nommé lieutenant général le 23 Août 1569. L'un des objectifs de la campagne est de reprendre la ville de Vézelay, occupée militairement par les huguenots depuis deux ans. Après avoir pris et pillé Noyers, une des résidences du prince de Condé, les troupes de Sansac entreprennent le siège de Vézelay le 6 octobre 1569. Claude Hodoart, nommé colonel reçoit le commandement de l'infanterie. Le 14 octobre suivant, il trouve la mort en escaladant une brèche pratiquée dans les fortifications. La résistance acharnée des protestants empêche la prise de la ville et oblige Sansac à lever le blocus.

Les circonstances de la mort de Claude Hodoart n'ont pas effacé les exactions commises dans sa lutte contre les réformés. Aussi la disparition du seigneur de Foissy a-t-elle laissé peu de regret. Son mépris du danger, reconnu par ses supérieurs hiérarchiques en avait fait un chevalier de l'Ordre du Roi. Sans doute, Galéas de Bérulle, familier des Guises, personnages puissants, n'était-il pas étranger à cette nomination.

Conclusion

Les Hodoart, seigneurs de Foissy, n'ont pas réussi à se faire anoblir. A la convocation du ban et de l'arrière-ban du bailliage de Sens de 1575, Jean Hodoart et sa nièce Claude, veuve de Charles de Briscadiou sont imposés comme des bourgeois à la différence de Savinien Hodoart, leur père et grand-père paternel. Aucune mention n'est faite de l'impôt du sang versé par Claude Hodoart.

Plus heureux, les cousins de l'autre branche sont reconnus par la noblesse de l'Orléanais, vers 1635.

Enfin, le souvenir des Hodoart demeure dans le nom d'un lieu-dit de la commune de Foissy-sur-Vanne.

Pierre BELIN
Foissy-sur-Vanne, novembre 2001